L'Arche de Rantanplan le T10 des Aventures de Lucky Luke

L’Arche de Rantanplan, la dixième aventure de Lucky Luke d’après Morris transforme le chien le plus bête de l’Ouest en égérie de la cause animale. Avec ce nouvel album, Achdé & Jul abordent les débuts de la lutte pour le bien-être des animaux aux Etats-Unis. Pandémie mondiale oblige, le scénario invite quelques références à la Covid-19.

Couverture de L'Arche de Rantanplan — © Lucky Luke – Achdé et Jul – Lucky Comics

Lorsque Lucky Luke débarque à Cattle Gulch – village au nom prédestiné (on laissera au lecteur le soin de la traduction) – pour déguster un bon steak, il ne se doute pas que la cité est en ébullition. Les habitants sont en colère contre Ovide Byrde, un type un peu farfelu dans cet ouest américain sauvage. Car oui, ce gars est le président (et unique membre) de la société protectrice des animaux de ce comté ! Ses idées sont abracadabrantes : il ne mange que des fruits ou des légumes, adopte des chatons et libère des chevaux que l’on a même plus le droit de maltraiter.

Page 3 de L'Arche de Rantanplan — © Lucky Luke – Achdé et Jul – Lucky Comics

Inspiré par les discours de Henry Bergh, fondateur de la Société américaine de prévention de la cruauté envers les animaux, Ovide Byrde a, en outre, créé une sorte de refuge qui héberge un tas de bestioles. Mais les temps sont durs pour le bienfaiteur de la cause animale et les financements manquent, jusqu’au jour où Rantanplan, pensionnaire de cette drôle de maison, découvre de l’or. Cette nouvelle fortune est convoitée par Tacos Cornseed (sic !) qui recrute une bande de desperados végétariens afin de mettre Cattle Gulch au régime sans viande et ainsi de s’attirer les faveurs de Ovide Byrde.

Page 4 de L'Arche de Rantanplan — © Lucky Luke – Achdé et Jul – Lucky Comics

L’arche de Rantanplan et la cause animale

Si l’album traite de la cause animale, Lucky Luke en est-il devenu un farouche partisan ? Rien n’est moins sûr. Le thème est bien évidemment d’actualité. Le scénario de Jul dévoile un pan de l’histoire américaine de ce mouvement qui émerge dans la seconde moitié du XIXe siècle dans un environnement où les animaux, qu’ils soient sauvages ou d’élevage, avaient plutôt une valeur marchande aux yeux des pionniers (fourrure ou viande, par exemple).

D’une bonne action à l’extrémisme, il n’y a qu’un pas. Ainsi, attiré par l’appât du gain, Tacos Cornseed ne représente-t-il pas la frange de ce qu’il y a de plus mauvais au sein d’un mouvement d’aspiration noble en imposant, à coups de violences et de menaces, les idéaux du brave Ovide Byrde à la population de Cattle Gulch ? L’air de rien, c’est un album qui invite à une certaine réflexion sur la thématique et sur les excès liés à certaines causes.

Page 5 de L'Arche de Rantanplan — © Lucky Luke – Achdé et Jul – Lucky Comics

En outre, Jul glisse habilement quelques jeux de mots dans le scénario qui démontrent que la Covid-19 est passée par-là. Ainsi, la Pandémie mondiale s’invite dorénavant dans les productions artistiques et ce 10e opus des aventures de Lucky Luke d’après Morris est un album complètement ancré dans son époque.

Au dessin, et après 15 ans, Achdé lui-même, avoue commencer à digérer d’être le dessinateur de Lucky Luke. Il s’y est collé avec un certain talent, en reprenant les codes du regretté Morris et en y ajoutant sa patte. Ainsi, le dessin est agréable, mais forcément sans surprise. Ici, le principal défi aura été de caser un maximum d’animaux différents dans les différentes cases de manière à refléter la richesse de la faune, domestique ou sauvage, de l’Ouest américain. À la manière d’un habituel bon vieux Lucky Luke, le découpage de l’album est dense, mais rythmé.

Page 6 de L'Arche de Rantanplan — © Lucky Luke – Achdé et Jul – Lucky Comics

Après la ségrégation raciale dans “Un cow-boy dans le coton”, le duo Achdé & Jul s’est attaqué à une histoire méconnue de la conquête de l’Ouest. Est-ce un album qui dénonce les tortionnaires des animaux ou au contraire une histoire qui décèle les dérives de certains mouvements ? Chaque lecteur ou lectrice, en fonction de son degré d’attachement à la cause animale, y trouvera le niveau de lecture qui lui convient, Lucky Luke lui-même se montrant plutôt relativement neutre sur le sujet.

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